Les ondes gravitationnelles font la première lumière sur la fusion d’étoiles à neutrons

Les scientifiques de la collaboration LIGO-Virgo, qui comprend notamment l’équipe Optomécanique et Mesures Quantiques du Laboratoire Kastler Brossel, ont observé pour la première fois des ondes gravitationnelles émises lors de la fusion de deux étoiles à neutrons, et non de deux trous noirs comme dans les détections précédentes. Autre première : cette source d’ondes gravitationnelle a aussi donné des signaux lumineux, observés dans les heures, jours et semaines qui suivirent grâce à la collaboration de 60 autres observatoires sur Terre et dans l’espace. Cet ensemble d’observations, qui marque l’avènement d’une astronomie dite « multi-messagers », fournit une moisson de résultats : de la résolution de l’énigme des sursauts gamma courts à celle de l’origine des éléments chimiques les plus lourds – comme le plomb, l’or ou le platine –, en passant par l’étude des propriété des étoiles à neutrons ou par une mesure indépendante de la vitesse d’expansion de l’Univers. Une dizaine d’articles scientifiques publiés le 16 octobre 2017 détaillent ces différents aspects (voir liens en fin de page).

 

Première observation de la fusion de deux étoiles à neutrons

Dans un article publié par la revue Physical Review Letters, les scientifiques de la collaboration LIGO-Virgo présentent la première observation d’ondes gravitationnelles émises lors la fusion de deux étoiles à neutrons.

Cette observation, réalisée le 17 août 2017 avec le réseau de trois détecteurs d’ondes gravitationnelles LIGO-Virgo, est sans ambiguïté, le rapport signal sur bruit combiné étant de 32, le plus fort de toutes les observations d’ondes gravitationnelles réalisées jusqu`à présent.

Ce signal, bien plus long que dans le cas de la fusion de trous noirs (une centaine de secondes contre une fraction de seconde), montre que les deux objets qui finissent par fusionner sont beaucoup plus légers. La fréquence du signal révèle que ces objets tournent vite l’un autour de l’autre et sont donc très compacts. Le fait que des signaux lumineux soient observés exclut l’hypothèse de trous noirs légers : ce sont donc bien deux étoiles à neutrons, de masses comprises entre 1,17 et 1,60 fois celle du Soleil d’après une analyse plus poussée des données.

Le signal d’ondes gravitationnelles est très visible dans les données de l’instrument LIGO-Livingston, un peu moins dans les données de LIGO-Hanford. Il n’est pas visible dans les données de Virgo compte tenu de la position de la source qui se trouvait dans une zone du ciel où le détecteur Virgo était peu sensible à ce moment-là – une sorte d’angle mort. Cependant, ce fait même est essentiel pour localiser finement la position dans le ciel de la source d’ondes gravitationnelles : il a permis d’exclure certaines zones du ciel et de restreindre la zone diffusée aux astronomes de 190 degrés carrés à 31 degrés carrés.

Une nouvelle astronomie « multi-messagers »

L’article qui comporte le plus grand nombre d’auteurs a été publié dans la revue Astrophysical Journal Letters. Elle est cosignée par les scientifiques de la collaboration LIGO-Virgo et par ceux de 70 autres groupes ayant mené des observations avec des instruments situés au sol ou à bord de satellites.

C’est la première fois qu’un objet astrophysique est observé grâce à deux types de messagers cosmiques différents : les ondes gravitationnelles et la lumière qu’il émet. La collaboration LIGO-Virgo a en effet des accords de partage d’information avec près de 90 groupes à même de scruter le ciel avec différents types d’instruments.

La figure ci-dessous résume les observations ayant permis la localisation de la source. Les données provenant des détecteurs d’ondes gravitationnelles LIGO et Virgo sont en vert (vert pâle pour LIGO uniquement, vert soutenu en ajoutant les informations du détecteur Virgo). Celles des détecteurs de rayon gamma en bleu (en bleu soutenu pour Fermi-GBM et bleu pâle en utilisant la différence de temps d’arrivée des signaux de Fermi et d’Integral). L’encart supérieur montre la galaxie hôte (NGC 4993), ainsi que la première image de la source d’ondes gravitationnelles, prise par le télescope Swope 10,9 heures après la fusion des deux étoiles à neutrons (le point en haut à gauche de NGC 4993 n’est pas présent dans l’image du bas, obtenue 20,5 jours avant la fusion).

 

Multi-Messenger Observations of a Binary Neutron Star Merger The LIGO Scientific Collaboration and The Virgo Collaboration, avec une cinquantaine d’autres collaborations, accepté à Astrophysical Journal Letters.

Lien vers les articles : http://public.virgo-gw.eu/gw170817_papers

Résumé scientifique « Infographique » de la détection GW170817: PDF

Lien vers le Dossier de Presse : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/5253.htm

« Deux étoiles à neutrons »  Image Crédit: National Science Foundation/LIGO/Sonoma State University/A. Simonnet

Contact : Pierre-François Cohadon